Le 13/06/2020

Les robots au service de la viticulture

La robotique agricole révolutionne le travail de la vigne: gain de temps, réduction de la pénibilité et des pesticides, des opérateurs moins exposés… Les avantages à se tourner vers les robots sont nombreux.

Cependant le secteur est encore jeune et plusieurs enjeux restent latents pour les constructeurs. C’est pour répondre à ces problèmes et trouver une réponse collective que se sont réunis plusieurs acteurs du secteur lors de la 4ème édition du FIRA (Forum International de la Robotique Agricole). Autour de David FRABOTTA, Cedric BACHE, PDG de Vitibot, Fabien ARIGNON, PDG de SITIA et enfin Thierry BIDAUT, Responsable vignoble chez Pernod Ricard, ont discuté de leur vision de la robotique dans le domaine viticole, des enjeux, de l’évolution du secteur et des modèles économiques possibles.

Pourquoi utiliser un robot pour la viticulture ?

Pallier le manque de main d’oeuvre est avantages principaux de la robotique : il y a des difficultés dans le recrutement d’opérateurs dans l’agriculture en général de par un manque d’attractivité et la pénibilité des tâches, notamment le travail du sol. Le robot vient ainsi libérer l’exploitant de ces tâches pénibles et chronophages pour qu’il puisse s’orienter vers d’autres travaux.

L’arrivée de nouvelles pratiques ou de nouvelles normes, plus respectueuses de l’environnement comme la disparition du glyphosate remettent les tâches manuelles de désherbage à l’ordre du jour, le robot permet ainsi de diminuer l’application de pesticides et de protéger également les opérateurs exposés à des produits chimiques.

De plus, le robot apporte “précision et répétitivité” selon Fabien ARIGNON, ce qui permet de faire des économies de temps et de pesticides et donc de gagner de l’argent.

Thierry Bidaut de l’entreprise Pernod Ricard a reconnu que la robotique constitue une alternative durable aux enjeux du secteur, d’où son intérêt pour une start-up telle que Vitibot avec laquelle elle a noué un partenariat. La création de l’appellation “viticulture durable en Champagne” a incité le géant du vin et des spiritueux à réfléchir à d’autres solutions pour rendre sa production plus éco-responsable.

Les robots sont parfois mal acceptés et l’opinion publique ne voit pas forcément l’apport de la nouvelle technologie, quel est votre avis ?

L’agri-bashing est apparu depuis quelques années et touche particulièrement les viticulteurs. Pour répondre à ce constat, Cédric BACHE indique qu’il faut garder à l’esprit que certains terrains escarpés ou sinueux imposent de s’adapter : encore maintenant sur certaines vignes “l’opérateur avance derrière sa machine en combinaison intégrale, dans l’embrun de produits.” Cela pose des questions de sécurité et de santé et c’est pour cela que très récemment des expérimentations ont été menées avec des drones qui pulvérisent avec précision sur des vignes pentues. L’arrivée de robots plus petit pourrait faciliter l’accès à des terrains difficiles.

L’impact de la robotique sur l’agri-bashing est un thème qui sera abordé plus en profondeur lors du FIRA 2020 (INCLURE LIEN)

Les robots autonomes se retrouvent donc face à plusieurs enjeux : environnementaux avec des pratiques toujours plus respectueuses de l’environnement, sécuritaires et sanitaires en limitant l’exposition de l’opérateur ou du public à des produits chimiques , mais aussi économiques. Des enjeux bien retranscrits par Henri Bies-Pieré, vice président de la FNSEA et intervenant au FIRA 2019 dans son article publié dans la revue Le journal de l'école de Paris du management 2019/2 (N° 136)” (Article payant)

Ils ne répondent pas réellement à la question qui est en gros: comment faire face à la désapprobation concernant les robots de la part de l’opinion publique.

A l’avenir, quels sont les fonctions du robot à développer ?

Jusqu’à présent les robots ne traitent que la partie mécanique des travaux et ne touchent pas du tout à la partie manuelle car celle-ci nécessite un savoir-faire et une dextérité que les machines n’ont et n’auront pas dans un futur “prévisible”.Le but est ainsi d’allier le “bon sens paysan”, c’est-à-dire l’intelligence de l’homme et la capacité de travail mécanique du robot, selon Cédric BACHE.

Vitibot souhaite rendre sa plateforme plus polyvalente en incorporant de nouvelles fonctionnalités telles que la pulvérisation. “Les agriculteurs veulent du débit de chantier, grâce à une machine endurante et robuste”, selon Fabien ARIGNON.

On perçoit chez le consommateur un besoin d’information sur le produit qu’il consomme dit Thierry Bidaut et la robotique doit contribuer à cette attente.

Quel business model pour ces technologies ?

L’avantage de la viticulture est que c’est un secteur assez concentré, qu’il y a très peu de petites exploitations. Vitibot a alors choisi de vendre en direct en Champagne et dans la région bordelaise afin d’assurer un suivi permanent et de se concentre sur deux régions.

Les distributeurs ne sont pour l’instant pas prêts à accompagner les clients. Selon Cédric BACHE, la part de service va grandir avec la montée de l’agriculture de précision qui, via des capteurs, établit des plans et permet une utilisation optimale des produits. L’analyse de données va devenir une activité prépondérante pour les constructeurs, ainsi que la formation des opérateurs et le suivi du fonctionnement des robots. Un accompagnement nécessaire pour Pernod Ricard car “la technologie nous est inconnue” déclare Thierry BIDAUT “et c’est là que Vitibot doit nous aider”.

SITIA iinsiste sur l’alliance avec des acteurs déjà présents pour gagner du temps. La PME choisit de sous-traiter pour pouvoir aller plus vite. “Les modèles évoluent, il est difficile de choisir lequel sera le plus pérenne”, selon son PDG, “nous nous contentons d’apporter la technologie pour le moment.”

La multiplication des petits terrains fait des CUMA une option de plus en plus envisageable pour diminuer les coûts pour les exploitants, une barrière encore très présente pour la robotique agricole. Uniformiser les traitements permettrait à toutes les exploitations d’être au même niveau et d’éviter ainsi des soucis de sécurité notamment au niveau de l’exposition des opérateurs d’une exploitation aux produits épandus sur la parcelle voisine.

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